Retrace le destin des huit enfants de Louis-Philippe, doués pour les arts et pour les armes et élevés dans le sens du devoir et l'intelligence de la modernité. Après la mort tragique de leur frère aîné, le duc d'Orléans en 1842 puis la chute de leur père, en 1848, aucun de ces enfants ne parvint à jouer un rôle politique majeur.
La démocratie française est-elle ingouvernable ? Cette question qui rencontre une singulière résonance aujourd'hui était déjà posée avec vigueur, il y a plus d'un siècle. Nulle période n'aide mieux à comprendre cette curieuse exception française que celle qui s'ouvre avec l'élection à l'Elysée de Félix Faure, président sans grand relief, et qui s'achève avec la défaite, face à Deschanel, de Georges Clemenceau, le «Tigre», pourtant tout nimbé de la gloire de 1918. C'est le temps de l'affaire Dreyfus et des grandes querelles religieuses, celui de Combes et de Lyautey, c'est la jeunesse de De Gaulle ; le temps de la Belle Epoque, des crises, des souffrances collectives ; le temps de tous les contrastes et des occasions perdues.
La disparité est en effet saisissante entre, d'un côté, la vie politique quotidienne du régime, au rythme scandé par de pâles élections, des majorités incertaines et des politiques de faible souffle, et de l'autre, ses grandes réalisations dans le domaine économique, social, culturel, colonial. «Il doit donc y avoir autre chose», s'interrogeait le grand intellectuel Daniel Halévy, ami de Proust. Où étaient alors les ressorts cachés du pouvoir et de sa surprenante énergie ? D'où provenait vraiment cette vitalité du peuple français qui lui permit de supporter le terrible sacrifice de la Grande Guerre ? C'est un peu comme si deux régimes avaient coexisté, deux Républiques en une, comme si la France avait vécu deux vies en même temps. Là résident peut-être le secret de l'étonnante longévité de la IIIe République et celui de bien des incertitudes politiques actuelles.
La remise en perspective de trente-sept années de notre vie politique.
Napoléon, qui forgea des institutions administratives puissantes et durables, l'a lui-même reconnu : il fut un politique, avant d'être un militaire. Empereur à 35 ans, ce propagandiste de génie organisa un pouvoir personnel absolu, reposant sur l'ordre et sur la gloire. Ayant porté, par ses victoires, la France aux dimensions de l'Europe, il dut, plus qu'un régime, construire un système. Il trouva des adversaires résolus, bien que d'inégal danger, chez les émigrés et leurs réseaux, ou chez les intellectuels, de Chateaubriand à Madame de Staël. Il fut la cible de complots, dut compter avec les intrigues de ceux qui le servaient, chefs militaires ou ministres, et qui, tels Fouché ou Talleyrand, étaient prêts à l'abandonner ou à le trahir. Il lui fallut composer avec la force retrouvée de l'Eglise, ainsi qu'avec la puissance sociale nouvelle des notables. Il dut enfin, dans la solitude du pouvoir, affronter non seulement l'irritation croissante des populations étrangères vassalisées, mais aussi la plus sourde des oppositions : la lassitude de son propre peuple. Revenu de l'île d'Elbe, il affecta, trop tard, de se faire libéral. Le mythe qu'il édifia à Sainte-Hélène devait être son ultime acte politique.
L'ère impériale a marqué une étape décisive dans la construction politique de la France contemporaine et la formation de l'esprit collectif des Français. Napoléon fut-il le premier dictateur moderne qui pérennisa à sa manière l'acquis de la Révolution ? Ou poursuivit-il un autre but, restaurer un ordre monarchique qui ne pouvait plus être celui des Bourbons, mais qui devait rompre résolument avec les désordres révolutionnaires ? Plutôt qu'un continuateur ou un héritier de 1789, ne fut-il pas l'initiateur d'une profonde révolution conservatrice, celle que la monarchie n'avait pas su imposer ?
Depuis la Révolution, la France n'a cessé de chercher à recréer un pouvoir qui dure. En ce sens, l'épopée conquérante de l'Empire fut aussi notre première grande aventure politique, porteuse de leçons, et source d'inépuisable nostalgie.
Le 7 mai 1995, avec l'élection de Jacques Chirac à la présidence de la République, s'est ouvert le dernier septennat de notre histoire républicaine.
Celui-ci s'est achevé le 5 mai 2002 par une réélection hors des normes, pour cinq ans. Le passage a plus qu'une dimension symbolique. Pendant ces sept années, des évolutions majeures se sont produites, puisant leurs sources au plus profond de notre histoire politique nationale. Insensiblement, sans vraiment s'en apercevoir, la France a changé de régime. D'éminents observateurs l'ont certes pressenti, puisque, ici ou là, déjà, l'on évoque volontiers une VIe République qui aurait jeté ses premières fondations.
Mais lesquelles ? A-t-on pour autant, réellement, substitué un régime à un autre ? Le dernier septennat est un nouveau témoignage de cette incapacité de la France à créer un pouvoir qui dure. Au fond, à travers les moments paroxystiques de son histoire, elle a connu une révolution inachevée, qui s'est traduite, pour elle, par de multiples crises pseudo-révolutionnaires. Le dernier septennat a traversé, en l'espace de quelques années, trois de ces fausses révolutions : un essai de révolution conservatrice qui a échoué faute d'un programme vraiment mûri : le gouvernement Juppé (1995-1997) ; un coup d'Etat inconscient - la dissolution (1997) suivie d'une nouvelle cohabitation, plus longue et castratrice, qui a cassé définitivement le pouvoir présidentiel dans sa version gaullienne : ce livre apporte des éclairages précis sur la mécanique de cet événement majeur ; une révolution passive, par défaut : le gouvernement par une majorité " plurielle " qui laisse le système existant se décomposer au milieu d'un monde en complète mutation, sans prendre d'initiative réelle (1997-2002).
Pourtant, les conditions d'une renaissance peuvent être identifiées, qui exigent une réforme profonde de l'Etat et de la société. Car il est urgent de reconquérir durablement des libertés politiques qui supposent l'autorité pleine et entière d'une démocratie assumée c'est-à-dire dotée d'un vrai gouvernement, et non de son apparence.