Les oaristys sont, dans la poésie antique, des paroles d'amour en forme de dialogue entre deux amoureux. Dans ces oaristys modernes, on n'entend qu'une des deux voix, celle de la femme, parlant de tout près à l'homme aimé, mi-voix célébrant l'humaine félicité d'être l'un à l'autre. Mais, si intime et privée qu'elle soit, cette voix de femme répercute la polarité générale des sexes, telle que l'époque la repense et la change, manière de renouveler l'éternel mystère de l'étrangeté de l'autre que ce mystère rend désirable.
Si la guerre des sexes, loin d'être de nature, ou de rendre fatal l'assujettissement de l'un à l'autre, n'était qu'un symptôme de la prédo- minance des valeurs de la guerre, rien n'empê- cherait d'espérer comme possible l'avènement d'une relation enfin heureuse et apaisée entre les hommes et les femmes. De guerre lasse, ces oaristys assument à la fois l'amour pour les hommes, les accents de rébellion contre un pouvoir subi et des mensonges rabaissants, et l'aspiration à un équilibre supérieur et à un hommage réciproque des deux sexes.
cette lecture du sophiste se concentre sur le passage central du texte de platon qui vise à établir la définition du sophiste.
il procède de la nécessité de déterminer la possibilité d'une parole fausse, mensonge ou habileté, pour débusquer le sophiste sur son propre terrain. il faut qu'il soit possible de dire ce qui n'est pas. pour cela il faudra admettre l'idée apparemment paradoxale d'un être du non-être que soutient platon contre le grand parménide. ce livre s'intéresse aux enjeux et conséquences de cette étrange moirure de l'être qui le soumet à des variations, des demi-teintes, des brisures et des raccordements.
l'une des parties évoque l'attitude d'hamlet, dans la fameuse scène 1 de l'acte iii, qui hésite entre l'opposition absolue de l'être et du non-être et leur tissage, douloureux et assumé, qui aurait cessé d'être tragique. par opposition à un langage de pouvoir et d'efficacité, le langage de la vérité repose sur une saisie de la relation à l'autre, libère le mouvement de la pensée et rompt, comme nietzsche l'a souligné, avec la vision tragique du réel.
À la question politique - outre l'engagement dont sa vie d'homme civil témoigne -, Swift répondit par sa vie d'homme de lettres.
Paradoxalement, la littérature " se nourrit de l'échec du politique ". Si elle n'a pas pouvoir de changer le monde, elle peut prétendre changer le regard sur le monde. L'oeuvre de Swift n'est que cette tentative, cette volonté qui, déréglant les perspectives, opère dans la vision du lecteur un retournement. Dans le carnaval de l'existence, sa littérature est une Saturnale, la fête terrible du renversement : les chevaux y sont seuls raisonnables (Voyages de Gulliver) et comme Saturne, l'économie marchande dévore les enfants d'Irlande (Modeste proposition).
Le vertige que son imaginaire suscite dessille le regard, lui impose des métamorphoses et, sous la conduite de la lettre et des apparitions qu'elle suscite, l'oeil transforme le monde qui transforme l'oeil. Dans une langue dont les bonheurs d'expression et la beauté crispée tient toute dans l'économie et l'exactitude, Emmanuelle Rousset nous donne un livre rare où la colère du ton allie impeccablement la promesse de la lettre à celle de la pensée.
Andromaque, acte IV, scène 5. Pyrrhus annonce sa trahison à Hermione dans une scène de rupture ordinaire. Il se montre lâche et Hermione, amère. Titus et Bérénice se séparent dans l'assomption de l'éternité de leur étreinte, mais Pyrrhus et Hermione s'adressent leurs derniers mots dans les sifflements du désir opiniâtre et sourd.
Les sentiments vulgaires de la haine jalouse et de la mauvaise conscience sont portés par une langue rayonnante qui opère comme une radiographie. Les coeurs rusés sont rendus translucides et sans profondeur. Bien avant Freud, les personnages sont trahis par leur propre parole. Dans ce théâtre de clarté qui fait dire la vérité au mensonge, les désirs mis à nu sont ceux de l'homme moderne : effroyablement solitaires, violents, inaudibles, inconciliables et sans secours.
Dans une langue dense et poétique, suivant le texte de Racine de très près, Emmanuelle Rousset montre que le couple qui se déchire est une figure de la fatalité moderne. En exigeant ce qu'il ne peut donner, chacun devient le loup de l'autre. La scène de ménage reflète l'incapacité de l'homme sans Dieu à honorer l'infinité de son désir.
Tous les dimanches, au Jardin du Luxembourg, Blanche vient s'asseoir sur le même banc, dans l'espoir d'y rencontrer l'homme de sa vie. Un jour, un vieillard la rejoint et s'installe sur la place que la jeune femme réserve à son futur grand amour. Contrariée, elle s'apprête à partir lorsqu'il s'adresse à elle. Blanche comprend qu'il est perdu et que sa mémoire ne l'aidera pas. De son existence toute entière, il ne reste qu'une seule certitude : son prénom. Il s'appelle Jean.Le parc va bientôt fermer. Que doit-elle faire ? Jean est élégant, soigné, mais il dégage une détresse et une fragilité si profondes qu'elle ne peut se résoudre à tourner les talons sans état d'âme. Malgré ses inquiétudes qui grondent, Blanche mène son enquête sur cet inconnu, déterminée à lui rendre ses souvenirs, reconstituant peu à peu le puzzle d'une vie, une histoire qui fera basculer la sienne.