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Sciences humaines
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Faire de l'histoire, c'est marquer un rapport au temps. Depuis plus de quatre siècles, l'historiographie occidentale se définit par la coupure qui d'un présent sépare un passé. Le geste qui met à distance la tradition vécue pour en faire l'objet d'un savoir est indissociable du destin de l'écriture. Écrire l'histoire, c'est gérer un passé, le circonscrire, organiser le matériau hétérogène des faits pour construire dans le présent une raison ; c'est exorciser l'oralité, c'est refuser la fiction. C'est, pour une société, substituer à l'expérience opaque du corps social le progrès contrôlé d'un vouloir-faire. Ainsi, depuis Machiavel, l'histoire se situe-t-elle du côté du pouvoir politique qui, lui, fait l'histoire. Michel de Certeau s'attache à caractériser ici les opérations qui règlent l'écriture de l'histoire : la fabrication d'un objet, l'organisation d'une durée, la mise en scène d'un récit.
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Histoire et psychanalyse entre science et fiction
Michel de Certeau
- Folio
- Folio Histoire
- 21 Novembre 2016
- 9782070793778
Précédé d'Un chemin non tracé par Luce Giard. Nouvelle édition revue et augmentée en 2016
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Comment le diable est-il possible ? En 1632, la ville de Loudun est durement éprouvée par la peste. Les croyants se retirent, s'enterrent dans leurs petites communautés assiégées par cette épreuve de la colère divine. Parmi elles, les ursulines. La possession des soeurs prend alors le relais de la peste : les premières apparitions - fantôme d'un homme de dos - sont nocturnes, puis elles deviennent diurnes, se précisent, et revêtent la forme obsédante d'un curé, Urbain Grandier. L'affaire commence. Loudun, ville ouverte, devient le centre et le théâtre d'un monde : six mille spectateurs assisteront à la mort de Grandier, sur le bûcher, le 18 août 1634. Entre-temps, les pouvoirs s'affrontent, les savoirs s'inquiètent, l'âme catholique s'émeut. Le corps social se déchire ; partout le diable est là, mais il est partout ailleurs : dans le silence des textes, les lacunes du langage. Michel de Certeau montre, dans ce grand ouvrage, comment guérit une société malade d'elle-même.
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Voici les chemins pluriels qu'emprunte la culture commune pour échapper à ses maîtres, rêver de bonheur, affronter la violence, habiter les formes sociales du savoir, se glisser à l'école ou à l'université, donner forme neuve au présent et produire ces voyages de l'esprit sans lesquels il n'est point de liberté.
Avec lucidité, avec une étonnante justesse, cet essai dessine les figures possibles d'une invention sociale, en un geste politique plein de tendresse pour la foule anonyme.
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La prise de parole, et autres ecrits politiques
Michel de Certeau
- Points
- Points Essais
- 28 Mars 1994
- 9782020217989
Ecrite entre mai et septembre 1968, La Prise de parole résonne des paroles et des pas de la foule enthousiaste qui, s'emparent des mots et des rues, crut s'être donné le pouvoir de changer la vie. De ce moment "inouï", Michel de Certeau cherche à élucider le sens avec émotion retenue, avec un émerveillement mêlé de gratitude.
Dans une série de textes composés entre 1975 et 1985, on le voit ensuite suivre l'émergence d'une conscience politique, la construction d'une liberté, en Amérique latine, des les luttes armées, ou parmi les Indiens, ou ici même, dans les relations quotidiennes entre les "gens ordinaires", ou encore, à l'école, quand il faut gérer les différences d'appartenance entre les enfants.
A travers des lieux, des situations, des circonstances distinctes, la même attention s'attache à la naissance possible d'un destin propre. "Politique est le projet de celui qui veut surprendre l'invention de la société" (Jacques Revel).
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L'etranger ou l'union dans la difference
Michel de Certeau
- Points
- Points Essais
- 14 Octobre 2005
- 9782020829342
Dans cet ouvrage (publié en 1969), Michel de Certeau dit l'essentiel, à ses yeux, de l'expérience chrétienne : la rencontre de l'autre, de tous les autres, chacun reçu dans sa différence sur le chemin du Dieu Tout-Autre. Les récits des Écritures, la prière des croyants, la force d'une tradition, mais aussi les incertitudes d'une société quand le langage commun s'érode, la violence de l'histoire, l'affrontement des cultures, tout vient nourrir, inspirer, altérer, mettre en mouvement, dans la particularité d'une vie qui prend le risque d'un voyage vers l'Autre, comme autrefois Abraham s'en alla vers la promesse d'un autre pays.
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La foi chrétienne est devenue une option singulière. Nous avons perdu l'évidence d'une institution vénérable - l'Église - d'où nous venait un corpus d'Écritures et de pratiques. Aujourd'hui, privé de certitudes, un chrétien doit chercher sa voie. Comment vivre et penser cette singularité de la foi chrétienne, comment saisir sa vérité intérieure et inscrire socialement ce « chemin non tracé » ? Écartant les paroles convenues, Michel de Certeau montre avec force ce que « croire » veut dire, quelle dynamique la foi suscite en celui qui en prend le risque, quelle exigence de vie et quelle radicalité de pensée elle nourrit, comment elle anime le lien social. Quand la confession de foi s'énonce sous le signe de la « faiblesse », il se découvre en elle « quelque chose qui nous échappe : un désir inguérissable », une espérance sans pareille.
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Le lieu de l'autre. histoire religieuse et mystique
Michel de Certeau
- Seuil
- 14 Octobre 2005
- 9782020844857
Michel de Certeau (1925-1986) eut comme objet privilégié l'histoire religieuse aux XVIe et XVIIe siècles.
De ces croyants querelleurs et inquiets, marqués par la fracture de la Chrétienté, il interrogea le trouble, la ferveur, les écrits, les réformes. Analysant des travaux exemplaires (Henri Bremond dans l'Histoire littéraire du sentiment religieux, Robert Mandrou sur les procès de sorcellerie), il montre comment il s'en distingue.
Chez lui, l'élucidation historiographique ne se sépare pas de l'enquête historique, d'où son insistance sur l'altérité du passé, sur une distance critique, sur un respect sans complicité.
Servi par une familiarité rare avec les écrits de théologie et de spiritualité, l'historien peut varier les registres. Tantôt un personnage central tient la scène (René d'Argenson, intendant du roi, ou Charles Borromée, réformateur tridentin de Rome à Milan) ; tantôt il s'agit d'un moment décisif pour une institution (la Compagnie de Jésus sous le généralat d'Aquaviva) ou d'un texte fondateur (les Exercices spirituels de saint Ignace).
Parfois l'historien fait resurgir un enchevêtrement de milieux dévots désireux de réformer l'Église, une multiplicité de réseaux collectant lettres et récits où résonne l'écho passionné de débats mystiques. A tous, il rend vie et signification en cherchant le lieu de l'autre, dans l'altérité de Dieu, dans le conflit des différences entre croyants, dans la rencontre d'autres sociétés. D'où le regard tourné vers l'anthropologie naissante, avec Montaigne, qui jugeait les cannibales du Brésil, entrevus à la Cour, comparables aux sujets du roi, avec Lafitau, qui allait inscrire les moeurs et coutumes des Amérindiens dans la longue histoire de l'humanité.
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La fable mystique ; XVI - XVIIe siècle
Michel de Certeau
- Gallimard
- Bibliotheque Des Histoires
- 13 Mai 1982
- 9782070209743
Voici l'étude d'une figure historique de la mystique chrétienne. Figure passante organisée autour des rapports entre un sujet parlant, une parole et une institution, quand se déchire le monde des certitudes médiévales, que la foi se fait combat et question, que l'ordre traditionnel tombe en ruine et que s'ouvrent mille autres lieux pour restaurer la communication spirituelle. Brûlé par l'amour d'un Autre, le sujet (souvent féminin) dit son désir d'une impossible rencontre, à travers les surprises et les violences d'un récit d'extases, de grâces et de blessures. La manière de dire lui importe davantage que le dit, et sa parole se fait musique, poème, dialogue et fable. Associés aux images troublantes du fou, de l'idiot, de l'enfant, de la femme ou de l'errant, les mystiques se réfèrent et se dérobent au pouvoir de l'institution ecclésiale, emportés d'un mouvement qui est transport, passion, mais aussi «vie commune de la foi».
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L'invention du quotidien Tome 2 ; habiter, cuisiner
Michel Certeau, Luce Giard, Pierre Mayol
- Folio
- Folio Essais
- 15 Février 1994
- 9782070328277
Nouvelle édition revue et augmentée, présentée par Luce Giard
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Une politique de la langue
Michel de Certeau, Dominique Julia, Jacques Revel
- Folio
- Folio Histoire
- 4 Septembre 2002
- 9782070424573
Comment naît une langue nationale ? La Révolution française a été confrontée d'emblée au problème linguistique, dès lors que, fondant un ordre politique et social neuf, elle entendait rallier à son projet des masses patoisantes. Entre les projets fédéralistes de 1790 et les mesures jacobines de destruction décidées en 1793-1794, l'enquête sur les patois de l'abbé Grégoire tient une place stratégique. Sous les yeux des correspondants de Grégoire, pouvoirs, savoirs et croyances bougent ensemble. Dangereux et fascinant, le monde du patois est pour eux le proche mais l'autre. Dans la géographie des Lumières, un monde impensé surgit : la campagne. Qu'est ce peuple à qui la Révolution assigne désormais la mission de faire l'histoire ? Cette campagne, à la fois jardin des origines et noire réserve de l'animalité ? Comment mobiliser un savoir local au service d'un dessein politique : le triomphe du français, qui doit être celui de la Nation et de la Raison ?Paris dicte le geste qui retranche dans la marginalité et bientôt le folklore les cultures régionales.
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Une politique de la langue ; la Révolution francaise et les patois
Michel de Certeau, Dominique Julia, Jacques Revel
- Gallimard
- Bibliotheque Des Histoires
- 25 Avril 1975
- 9782070293230
Comment naît une langue nationale ? La Révolution française a été confrontée d'emblée au problème linguistique, dès lors que, fondant un ordre politique et social neuf, elle entendait rallier à son projet des masses patoisantes. Entre les projets fédéralistes de 1790 et les mesures jacobines de destruction décidées en 1793-1794, l'enquête sur les patois de l'abbé Grégoire tient une place stratégique. Sous les yeux des correspondants de Grégoire, pouvoirs, savoirs et croyances bougent ensemble. Dangereux et fascinant, le monde du patois est pour eux le proche mais l'autre. Dans la géographie des Lumières, un monde impensé surgit : la campagne. Qu'est ce peuple à qui la Révolution assigne désormais la mission de faire l'histoire ? Cette campagne, à la fois jardin des origines et noire réserve de l'animalité ? Comment mobiliser un savoir local au service d'un dessein politique : le triomphe du français, qui doit être celui de la Nation et de la Raison ? Paris dicte le geste qui retranche dans la marginalité et bientôt le folklore les cultures régionales.