À la fin du roman de Mary Shelley, le monstre disparaît, emporté par un radeau de glace. Il avait promis, ayant causé la mort de son créateur et de ses proches, de s'immoler sur un bûcher funéraire. Mais la fin ouverte du roman lui permet de s'émanciper de son créateur Frankenstein tout comme de la romancière Mary Shelley.
Depuis, libéré de toute emprise, le monstre n'a cessé d'errer de roman en pièce de théâtre, de pièce de théâtre en adaptation cinématographique, d'adaptation cinématographique en bande dessinée ou en jeu vidéo.
La créature de Frankenstein existe. Née des pouvoirs de la science, elle hante notre culture et pulvérise la séparation entre le réel et l'imaginaire. Jusque dans les avancées scientifiques les plus récentes, nous ne cessons de la rencontrer. Elle résume la tentation des temps actuels : dépasser les limites que nous assigne notre condition d'êtres humains.
Une biographie qui raconte la prodigieuse métamorphose du monstre en son créateur, son évasion du domaine de la fiction et son errance dévastatrice dans notre quotidien.
Si la science a été entravée au fil de l'Histoire par le pouvoir politique ou religieux, elle a aussi pu se ranger d'elle-même du côté du pouvoir jusqu'à trahir ses propres idéaux, se dévoyer.
La science moderne n'a-t-elle pas changé ellemême de « voie », à partir de la révolution industrielle ? Devenue technoscience, elle s'est mise au service d'entreprises de destruction industrielle. En outre, ne vise-t-elle pas désormais à une réinvention artificielle du monde ? La technoscience, ingénierie sans limite de la réalité, s'édifie aujourd'hui sur une résignation implicite qui veut réinventer l'être humain.
Ce livre, s'il se veut une mise en garde contre les dévoiements de la science, est aussi un acte de confiance en celle-ci. La science, parce qu'elle est « co-naissance », est le savoir qui nous permet de naître et de re-naître sans fin. Elle élève l'être humain plutôt qu'elle ne le nie. À travers deux grands thèmes : la science et le pouvoir, et la science et la puissance, l'auteur souhaite redonner à la science, un idéal humaniste.