Trois voyages pour une seule métaphore : l'existence humaine, tragique, se déploie au coeur de ces récits dans l'itinéraire des utopies amoureuses, d'illusions en déceptions, de représentations fictives en destruction du désir, de liberté en aliénation. Le premier voyage est celui d'Alice Star. Cette fille au passé misérable de vedette du porno fait une carrière de star de la pop. Lors d'un concert extraordinaire, devant son public fasciné, Alice est enlevée par un extraterrestre, Adam, qui lui fait vivre une nouvelle genèse, un amour fou... L'espace de quelques années-lumière la protégera-t-il de la chute ?
Aliyé voyage moins qu'elle ne fuit : son désir d'être autre ou ailleurs n'est - il que le triste reflet de l'immaturité ? Elle veut rompre, traverser la glace, trouver ce "je" qui n'est pas encore, au risque que, dans la recherche, il devienne un "autre"..
Ali vit à Mardin, à l'est de la Turquie, derrière la frontière : suffit-il de passer de l'autre côté, loin d'un milieu traditionnel et de ses déterminations sexuelles, pour se libérer des blessures du passé, des obsessions du présent ? A l'ère des images, le miroir littéraire que tend Murathan Mungan nous renvoie l'insoutenable vérité des pays de merveilles.
Ce recueil de nouvelles pourrait se résumer en quelques mots : liens amoureux, filiaux, amicaux ou tout simplement humains. Un couple de célibataires d'un âge respectable se construit à partir d'une rencontre arrangée par des amis. Ils apprennent à se connaître avec gravité et patience et, contre toute attente, peu à peu se tisse entre eux un amour profond, une confiance et une compréhension inattendues. Quand réapparaît dans la vie de l'homme une mère absente depuis sa plus tendre enfance, son épouse perçoit le choc silencieux de cette présence devenue si lointaine et le trouble que provoque en lui l'absence de tout sentiment à son égard. Une visite, une seule visite de cette mère oubliée, puis de nouveau le silence. Bien plus tard, l'annonce de la mort de cette femme et la découverte de son appartement à deux pas de leur maison inscrit en eux le partage d'une indicible souffrance. Un enfant obèse décide de maigrir. Devenu beau, il observe d'un oeil lucide l'attention amoureuse que lui porte son entourage. Un jeune lecteur rencontre l'écrivain qu'il vénère, entre eux se noue une relation douteuse aux yeux des autres, troublante pour l'écrivain mais sans la moindre ambiguïté pour le jeune homme que seule l'écriture de cet homme attire. Un père divorcé rencontre par deux fois son fils devenu grand. Deux fois il le conduit sur les hauteurs d'Istanbul puis d'Izmir pour contempler, pour lui offrir en partage, la beauté de ces villes ottomanes. Murathan Mungan continue à creuser la veine de la critique sociale à travers le portrait de relations affectives. Si, dans ses précédents ouvrages, il avait montré une prédilection pour des figures un peu marginales de la société turque, ce sont des amours plus ordinaires qui alimentent ces dix nouvelles où s'affirme la multiplicité de la Grande cité d'Istanbul. Ainsi se dessine une carte du Tendre tout à fait contemporaine, sans ambages, sensuelle et d'une grande poésie. Par ailleurs ces nouvelles composent un livre tout à fait convaincant sur la proximité d'âme entre Turcs et Européens, avec juste ce qu'il faut de touche «orientale».
Après des années d'exil, le jeune Akhbar rentre chez lui. Une automobile traversant de vastes étendues cernées de monts dénudés le ramène lentement aux portes de sa ville natale. Après de multiples contrôles, le temps de revoir les siens n'est plus très loin. Mais l'imprévisible advient : Akhbar est perdu, il ne retrouve personne, ni sa mère, ni sa soeur ni même la maison de son enfance, il ne reconnaît rien. Errant de ruelle en ruelle, Akhbar se heurte au silence et l'angoisse l'étreint. Dans cette ville en proie à l'effacement, les femmes semblent avoir disparu. Bouleversé par cette insidieuse réalité, Akhbar poursuit néanmoins ses recherches. C'est alors qu'il perçoit le glissement furtif d'un tchador, le lourd balancement d'une étoffe, épais coton de couleur sombre, presque une ombre sur l'ocre aveugle des murets...