Au début du mois de janvier 1920, après une soirée de lecture qu'il a donnée en Suisse, Rainer Maria Rilke reçoit la lettre d'une jeune admiratrice. Anita Forrer n'a pas dix-neuf ans, et le poète se montre immédiatement sensible à l'accent simple et sincère de cette voix, sous laquelle affleure une âme sensible et tourmentée. Commence alors une correspondance de six années au cours desquelles l'auteur des Cahiers de Malte Laurids Brigge se fait maître à penser, conseiller bienveillant - la guidant, et nous à leur suite, vers de vastes espaces spirituels, insoupçonnés...
L'Anthropocène, cette " ère de l'humain ", nous met face à un défi sans précédent dans l'histoire de la Terre. Face à l'anéantissement total de la nature dont nous sommes les artisans, et donc aux dangers qui pèsent sur nos propres conditions d'existence, nous devons façonner une nouvelle éthique de la cohabitation - plus encore : de la solidarité profonde avec tous les autres êtres vivants. Dans ce manifeste, Andreas Weber et Hildegard Kurt posent les jalons de cette pensée neuve, qu'ils appellent " vitalité ".
Partie intégrante d'un système terrestre où la culture est inséparable de la nature, l'être humain doit désormais se faire créateur. Une responsabilité nouvelle qui nous incombe et que le discours de l'Anthropocène entend affirmer. Plaidant pour une nouvelle politique du vivant, ce texte courageux, lumineux, écrit dans une langue fluide et puissante, touchera tous ceux qui cherchent des réponses à la crise globale que nous traversons.
Saul Friedländer revisite le chef-d'oeuvre de Marcel Proust dans cet essai sur la littérature et la mémoire, en explorant la question de l'identité - celle du narrateur du roman et celle de Proust lui-même. Il livre une enquête passionnante sur la manière dont le narrateur de la Recherche se définit par comparaison avec ce que nous savons de Proust et sur la signification de ces points de ressemblance et de divergence. Puisant dans son expérience personnelle, issue d'une vie passée à enquêter sur les liens entre l'histoire et la mémoire, le grand historien lauréat du prix Pulitzer offre une perspective nouvelle sur cette oeuvre fondatrice de notre modernité.
L'historien Mark Mazower éclaire les tragédies et les luttes du XXe siècle au miroir des engagements et des rêves d'une famille juive marquée par l'exil - la sienne.
C'est au fil de discussions avec son père, fils d'émigrés russes installés à Londres au tournant du XXe siècle afin d'échapper à la guerre civile et à la terreur, que l'historien entrevoit le passé complexe de sa famille, au-delà de la vie apparemment sans histoire de ses parents. Au centre de son récit, on trouve le personnage de Max, son grand-père, homme taciturne qui cache sous son air guindé et ses silences un passé d'agitateur révolutionnaire dans la Russie tsariste, qui lui valut exil forcé, emprisonnement, déportation en Sibérie... Lui et sa femme, Frouma Toumarkine, dont l'histoire familiale eut également son lot de drames, trouvèrent au coeur de la capitale britannique un port d'attache où construire pour leurs enfants une nouvelle vie, loin des malheurs traversés.
Retraçant la trajectoire des lignées Mazower et Toumarkine à partir de la fin du XIXe siècle - ce qui donne lieu à une série de portraits de personnages hauts en couleur -, Mark Mazower fait revivre un monde révolutionnaire à la fois socialiste, humaniste et internationaliste. On y croise la route de Lénine, d'Emma Goldman et de Litvinov, en naviguant de Moscou à la Sibérie, de Vilnius à Stalingrad, Londres et Paris.
Ceux qu'on a parfois appelés les « perdants de l'histoire » ont souvent plus à nous apprendre que les « vainqueurs ».
Dans ce texte puissamment universel, Daniel Schreiber, jeune et brillant philosophe allemand, raconte la fin de son plus grand amour, l'alcool, en puisant aussi bien dans son histoire personnelle que dans ses lectures sociologiques, philosophiques et scientifiques nombreuses.
Le Dernier Verre, c'est d'abord une histoire banale, une histoire qui arrive à tout le monde, à laquelle nous avons forcément été confrontés - à défaut de l'avoir vécue nous-mêmes :
L'histoire d'un penchant croissant pour l'alcool qui trouve son origine dans une consommation récréative et sociale, « légère » ; puis, de verre en verre, de soirée en soirée, dérape vers la véritable addiction, jusqu'à la perte totale de contrôle et l'enfermement physique et psychique.
Caractérisé à la fois par une grande rigueur intellectuelle et par une introspection personnelle sans concessions, Le Dernier Verre est un livre qui s'adresse au plus grand nombre.
Une belle nuit de pleine lune, quelque part en Norvège, dans les années 1970. Un couple dort. Soudain, madame se réveille, se transforme en loup-garou, trucide son époux - puis se rendort paisiblement. Au matin, les jumeaux Iselin et Edvard découvrent avec consternation la scène de carnage conjugal. Ils comprennent alors qu'ils sont les héritiers d'une très ancienne malédiction lycanthropique, et décident de fuir. Ils trouveront refuge, l'une auprès de terroristes passablement niais, l'autre dans une communauté de hippies ahuris. Mais rien ne sert de courir : on ne renie pas sa propre bestialité - pas plus qu'on n'échappe à celle d'un monde où l'homme est littéralement devenu un loup pour l'homme.
Fable anarcho-animalière? Satire politique? Thriller nihiliste? Délire surréaliste? Les Violences est un OLNI (objet littéraire non identifié) qui, sous des abords baroques, se lit comme une allégorie terriblement actuelle et lucide, réglant son compte, dans un éclat de rire sauvage, à toutes les utopies de notre siècle barbare.
Dans un monde que l'on traverse en quelques heures et où s'expatrier semble si simple, la notion de foyer a-t-elle encore un sens ?
Oui, découvre Daniel Schreiber lors d'un long séjour dans l'une des capitales européennes où il a ses habitudes. Une rupture amoureuse qui ravive le sentiment d'un vide ancien le ramène à son enfance dans un village de RDA, où la vie n'était pas tendre pour le petit garçon efféminé qu'il était. Sur les traces d'une grand-mère haute en couleurs, il se met en quête de ses racines. Cette promenade personnelle, historique et intellectuelle s'interroge avec Arendt sur le sens de la patrie, avec Didier Eribon sur le rapport à son milieu social, avec Maggie Nelson sur la possibilité d'inventer son foyer ou encore avec J. M. Coetzee sur le rôle de l'imagination dans la reconstruction autobiographique.
Loin des lieux communs, cet essai élégant esquisse avec pudeur les contours d'une nouvelle façon d'habiter le monde.
Après les jeux de l'enfance vient le temps des bagarres : Rico, Marl, Paul et Daniel grandissent à Leipzig et ont treize ans à l'automne 1989, au moment de la réunification. Ces fils d'ouvriers rêvent de devenir « les plus grands du quartier et même de la ville ». Entre vols de voiture, alcool, drogue et fêtes, entre rage et destruction, ils se sentent libres mais ont du mal à retenir la vie. Compagnons de misère, ils feront ensemble des expériences fondatrices, glissant irrémédiablement vers la délinquance et le désespoir, avant de se perdre de vue à l'aube de leurs vingt ans. Tour de force narratif, écrit dans une langue crue, sensible et pleine de rage, ce roman est l'histoire de la promesse, du rêve, d'une vie meilleure possible.
En 1946, le futur de la Palestine est plus incertain que jamais. Tandis que les Britanniques restreignent fortement l'émigration, des centaines de milliers de survivants de la Shoah disséminés en Europe tentent d'obtenir un visa, soucieux de gagner le Moyen-Orient. Lilya Wasserfall appartient à l'une des factions sionistes qui mènent, avec leur propre force paramilitaire, une violente lutte souterraine contre la puissance mandataire internationale. À ce titre, on l'envoie à Jérusalem à la recherche d'un scientifique disparu, Raphael Lind. Là, elle rencontre le frère de ce dernier, Elias, qui lui fournit des documents prouvant que Raphael vit toujours. Commence alors un périple incroyable qui l'amène de Londres jusqu'en Allemagne, au camp de Bergen-Belsen, point d'orgue de son voyage. Au fil de son enquête, Lilya commence à comprendre que les SS ont obligé Lind à travailler sur des recherches top secrètes sur les gaz toxiques...
Qu'est devenu Raphael Lind ? Quel secret cache David Guggenheim, mystérieux Américain rencontré en Bavière avec qui elle va nouer des liens très forts ? Lilya emmène avec elle le lecteur dans sa quête effrénée de vérité, découvrant ainsi des facettes inédites des heures les plus sombres de l'histoire.
Le Buson rassemble huit histoires (des nouvelles où le narrateur raconte des histoires d'histoires fortement stylisées par l'oralité de la langue) :
1. L'oiseau de malheur, une opérette soleuroise. D'ivrognes, d'agents de police et de la belle Maguelone : Il en ressort un tableau noir et grinçant, plein de personnages tristement comiques, avec en toile de fond une critique sans pitié de cette société-vitrine qu'est pour Bichsel la Soleure d'aujourd'hui. 2. Lancement d'un personnage. Qui est Salo-mon Adalbert Meier ? Le récit progresse à l'aveuglette. Des pans entiers de la vie de Meier passent ainsi de l'ombre à la lumière, et son image se révèle tantôt harmonieuse, tantôt délirante. 3. Un voyage en train. Le narrateur décrit, à travers la rencontre de deux voyageurs, le malaise qui peut naître d'une cohabitation forcée lors d'un trajet ferroviaire. ;
4. Robinson. Le jour où Robinson se réveille à neuf heures (trop tard pour aller au bureau), il remarque que les oiseaux chantent. Dès lors, il n'ira plus travailler ; victime d'une étrange amnésie, il passera ses journées à essayer de se souvenir de ce qu'il a fait la veille. 5. En passant par Baden-Baden. Le narrateur de cette histoire, un Suisse, s'est installé comme employé d'un hôtel dans la ville thermale de Baden-Baden.
Un autre Suisse s'installe et se met à singer en tout point les faits et gestes du narrateur. 6. Ces phrases. C'est l'histoire d'un homme qui rencontre un autre homme au bistrot du coin. Ivre, celui-ci lui confie : « Écoute-moi : ce n'est pas vrai que les hommes meurent. La vérité, c'est qu'ils sont toujours assassinés. » 7. Grammaire d'un départ. C'est comme un petit « traité de philosophie de notre perception temporelle d'un départ » qui se profile ici, avec son envers : repousser autant que possible le départ de la femme qu'il aime. 8. Une déclaration à l'élève [qui venait] de Prey. Une histoire où se tissent les rapports d'un élève et d'un professeur « érudit ». Un débat de fonds sur savoirs des savants et les récits véridiques des conteurs d'histoires et de fictions.